WHITECHAPEL
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.



 
AccueilDernières imagesRechercherS'enregistrerConnexion
-39%
Le deal à ne pas rater :
Pack Home Cinéma Magnat Monitor : Ampli DENON AVR-X2800H, Enceinte ...
1190 € 1950 €
Voir le deal

 

 Hunting party in Buckingham [to my deer Leopoldine]

Aller en bas 
2 participants
AuteurMessage
Edouard de Galles
Maman a dit : pas de drogue le dimanche.

Edouard de Galles


Messages : 20
Date d'inscription : 28/10/2010

Hunting party in Buckingham [to my deer Leopoldine] Empty
MessageSujet: Hunting party in Buckingham [to my deer Leopoldine]   Hunting party in Buckingham [to my deer Leopoldine] Icon_minitimeVen 26 Nov - 19:27

La chambre est vaste et les regards s'y bousculent. Les piaillements font une trame continue. Mais ils sont doux, aussi doux, presque, que les plumages qu'ils habitent. Et les piaillements, à ses oreilles, ne sont pas que musique, ils sont silence. Il ne les entend plus. Non, plutôt... C'est qu'il les entend toujours. Qu'il dorme, qu'il rêve, qu'il feigne vous écouter, toujours, ils sont là, à ses oreilles, à lui susurrer de beaux mensonges.

Voilà un bien grand personnage. Un homme fier à la taille élancée, cependant fort lâchement vêtu. De la boue sèche sur les bottes, un pan de la chemise s'est échappé du pantalon, le pantalon n'est plus noir, il est poussière. Le visage est sale, les cheveux rebelles, et les yeux rient. Ils regardent, tous, les mains, dont les doigts longs, les doigts fins, ont trempé dans le sang. Mais n'est-il pas beau, tout de même?
- Ah si, il est beau. Fort beau, murmure-t-il.
Ce reflet trouble, sauvage, ce reflet qui n'obéit en rien aux portraits ridicules qui pendent sur les murs.
- Votre bonheur est le mien, monsieur. Permettez?
Le couturier tend derrière lui un veston de style militaire et de couleur bleu nuit, aux attaches et boutons argentés. Edouard tend les bras et s'en laisse couvrir les épaules sans ajouter un mot. Ils ne comprennent jamais et croient toujours, naïfs, qu'il s'adresse à eux. Il détourne son regard du reflet, qui lui paraît soudain ennuyeux. Le couturier s'approche davantage, mains tendues vers la chemise, s'apprêtant à la replacer, mais le prince s'esquive. Il refuse, d'un imperceptible signe de tête, les gants qu'on lui propose, puis se dirige vers le couloir. Ils le suivent. L'un d'eux attrape un peigne et le glisse dans sa manche. Un autre se charge d'un flacon de parfum. Celui-là met les gants dans ses poches et celui-ci camoufle une chemise propre sous la sienne.

- Liszt... Bien. Et c'est... Arthur, qui joue. Qui veut parier? Vous voulez parier, Calvin? Stanley? Allons, qui veut parier! Je parie... un de mes fusils de chasse. N'importe lequel. Alors?
Ils ne répondent pas. Il fallait s'y attendre. Plutôt, ils s'affairent autour de lui, comme des parasites. Ils époussètent ses jambes, tentent de dompter sa frange, font cracher le parfum sur sa nuque, essuient ses joues et son front avec leurs manches, lui proposent une chemise propre, et à nouveau les gants. Edouard, de sa voix basse, d'un ton las, poursuit son chemin en les ignorant tant qu'il le peut, et parle. Il les entretient sur tout et rien. Sur Liszt, par exemple.
- L'un de vous a-t-il eu la chance de voir ses mains? Le pauvre vieux est mort il y a deux ans déjà mais, j'eus l'occasion, quelques temps avant qu'il ne se mette à délirer, de le rencontrer. Je n'étais alors qu'un adolescent... Mais ces mains, bon sang, ces énormes mains m'ont marqué pour le reste de mes jours.

La mélodie de la valse se fait de plus en plus distincte, des robes passent et sèment d'enivrants bouquets sur leur passage. Stanley, ou alors Charles, achève tout juste l'exploit de nettoyer les bottes de son prince alors que ce dernier marche.
Et les damoiseaux entrent. Les têtes se tournent, s'inclinent, les sourires s'animent, l'on va pour annoncer le nouveau venu, mais celui-ci, d'un discret geste de sa main maculée, nuque fléchie, regard fuyant, invite à poursuivre les célébrations. La danse reprend et Edouard se faufile. Du moins croit le faire, mais c'est le chemin qui s'ouvre devant lui. Ses compagnons l'entourent et se tiennent bien droits, saluant galamment messieurs et mesdames. Ils sont son bouclier. Confortablement masqué par sa sélection de jeunes hommes issus de la haute, il craint moins croiser le regard de la reine, de sa soeur - l'individu à blâmer pour cette abrutissante réception - ou de quiconque qu'il n'a pas envie de voir. Il pourrait se décrotter la narine et l'on n'y verrait rien.

Son parcours s'achève dans un coin de la spacieuse, lumineuse et très pompeuse salle. Il s'assied dans un fauteuil rouge et indique à ses garçons d'en faire de même. En fait, c'est là un signe qu'ils reconnaissent de manière semblable au « repos » des militaires. Et donc ils prennent place, de part et d'autre du prince. Certains bientôt discutent politique, littérature, philosophie, badinages de toutes sortes, d'autres sont rejoints par leurs amies, et l'un d'eux se penche à l'oreille d'Edouard.
- Elle y est. Vous l'avez vue?
Coude sur l'appui-bras, doigts sur les lèvres, le prince prend un temps à répondre. Il détourne la tête légèrement de Francis, ou alors Richard, afin d'éviter qu'il le voit la chercher du regard parmi la foule.
- Bien sur, marmonne sèchement le prince.
Malgré qu'il n'aperçoive pas le fin sourire poindre sur la bouche de son interlocuteur, il le devine et cela l'agace. Edouard soupire et baisse les yeux, pianote sur son menton et tape du pied. Rapidement l'on vient à son secours. Lorsque l'ennui point, il faut le chasser, et chasser se faisant les risques de glissements. Cette fois c'est Thomas, qui s'agenouille devant l'héritier, le sourire lui fendant le visage. Petit Tom est le plus jeune (à peine plus que le prince, pour dire vrai) de ceux auxquels le dauphin aime à songer en les qualifiant « d'amis », bien qu'il doute parfois que le terme soit réellement le plus approprié. Bref, avec Thomas, il n'y a – presque – jamais de doute, c'est bien lui.
- Edouard! Et si nous dansions, vous et moi, ensemble?
Jeune et un peu bête. Lourdement, Edouard fait l'effort de se redresser sur son siège, mais sa tête s'incline toujours sur le côté, car elle est lourde et s'alourdit.
- Non. Vous me marcheriez sur les pieds.
Au contraire de ses compagnons, sa réplique ne le fait pas rire.

C'est alors qu'il le vit, et à sa vue il bondit presque sur le fauteuil, ses mains soudain arrimées aux accoudoirs, son dos raidi et son regard fixé sur lui, à sa tête qui en dépassaient maintes autres, à sa belle gueule carrée et à son franc sourire. Lui, dans un élégant et classique smoking comme Edouard répugne en porter. Cependant l'habit, à lui, seyait à merveille. En voilà un, un vrai, que le prince avait jadis couronné du titre d'ami. Un favori de la cour, disait-on, mais en vérité Edouard, depuis qu'il était gamin, convoitait l'amitié sincère de ce dernier, un peu plus vieux que lui certes; aussi en avait-il fait une sorte de modèle.
Il sourit. L'ennui s'était volatilisé. Monsieur l'Ami le rejoindrait d'une minute à l'autre, lui ainsi que la charmante demoiselle qui-
- Dieu, non!
- Qu'y a-t-il, Edouard?
De l'ennui à la joie jusqu'à ce coup de stupeur qui le foudroya sur place. Mais à l'étonnement succéda une frustration que l'on voulut voiler derrière un masque. Rictus crispé en coin de bouche, regard cependant vif, comme si quelque flèche pourrait s'en échapper afin de l'atteindre, elle, et de lui percer le coeur.
Les voyant s'approcher, il chassa comme une mouche Richard-Francis et maquilla son rictus en un charmant sourire disons... suffisamment charmant pour berner un homme.
Revenir en haut Aller en bas
Leopoldine Lackey
Cent trente quatre maris valent mieux qu'un.

Leopoldine Lackey


Messages : 29
Date d'inscription : 03/11/2010

Hunting party in Buckingham [to my deer Leopoldine] Empty
MessageSujet: Re: Hunting party in Buckingham [to my deer Leopoldine]   Hunting party in Buckingham [to my deer Leopoldine] Icon_minitimeMar 14 Déc - 23:25



    Le monde est un grand bal où chacun est masqué. Elle ne vous le fait pas dire. Et tandis qu'elle revêt son masque d'élégance, elle songe à ce soir. Le corset comprime sa taille de guêpe. Ce soir est important. La broche en argent s'ajuste tout à fait à son chignon parfaitement exécuté. L'on s'affaire derrière elle. Elle les entend. Les ignorants complices de son machiavelisme. Leurs bourdonnements d'abeilles resonnent à ses oreilles comme un doux air de triomphe. Elle se penche vers le miroir, fidèle allié des apparences, repoudre son nez. « vous êtes magnifique chérie. » Un tendre baiser réchauffe l'épaule frissonante de la belle. Il est là, fort élégant dans son smoking parfaitement ajusté. Ces yeux rivés sur elle trahissent un amour trop dangeureux. Une note de parfum à son cou, ses pieds glissent dans ses mules et la voilà debout, prenant le bras de celui qu'elle nomme désormais son fiancé.


    Une femme peut fort bien porter une robe de bal sans savoir danser, une robe de cocktail sans avoir soif, un maillot de bains sans savoir nager, mais si elle met une robe de mariée, elle sait tout de suite s'en servir. Le fiacre stoppa sa course folle devant le palace de sa majesté. Buckingham. Est-il endroit plus somptueux où faire voltiger sa dentelle hormis la Cour du roi soleil quelques siècles auparavant ? Elle descendit la première, élégante, altière, suivie de près par sa victime que nous préfererons baptiser compagnon ou fiancé. Bien vite, ils se mêlèrent au gratin aristocratique, foule désireuse de se faire bien voir des grandes figures decisionnaires. Les talons des ladies claquaient au même rythme que les cannes finement sculptées de leurs gentlemen de cavaliers. Elle-même, appuyée au bras de son bien-aimé marchait posément. Nul besoin de se presser, ils seraient de toute façon accueillis de la meilleure des manières; lui étant attendu comme le fils prodigue. La rumeur de la salle de bal se faisait de plus en plus présente à mesure que l'on passait les portes et les enfilades de couloirs. La musique, peu audible pour lors, semblait attendre patiemment nos deux invités de marque. Lui marchait d'un pas décidé. Il savait où il allait et n'avait nullement besoin de ce majordome qui s'obstinait à vouloir les guider. Il y avait certes un moment qu'il n'avait pas arpenter les nombreux couloirs du palace, mais cela ne faisait tout de même pas une éternité pour qu'il ne se souvint plus du chemin vers la plus grande salle. Autrefois elle avait été l'un de leurs terrains de jeu préférés au prince et à lui. Car oui, précisons l'essentiel, monsieur est ce que l'on appelle communément un 'favori de la Cour'. Titre assez peu sympathique usité notemment par les grands jaloux de ce qu'il confère. Monsieur avait eu jadis l'honneur d'interesser le prince en personne et de se faire ami - l'un des très rares- de sa majesté. Quant à elle, rien ne la reliait de près ou de loin à la famille royale. Son nom néanmoins réferait à une grand famille anglaise expropriée en France depuis deux générations et qui s'était réimplantée peu avant la naissance de Leopoldine. Ses ancêtres avaient donc du fouler maintes fois ces planches vernis et ces tapis rapés. Enfin le couple parvint là où la fête battait son plein. La salle embaumait les parfums de femmes et l'odeur des bougies se consumant. L'on remercia le majordome puis on le renvoya. La jeune femme admirait les beautés de l'endroit. Monsieur lui recommanda de l'attendre un instant, il reviendrait dans quelques secondes, le temps de régler deux petites choses après quoi il se hâterait de la présenter au prince son ami. Elle acquiesca, souriante. Elle entreprit dès lors de scruter le moindre visage. Ennui, joie, tristesse, ivresse, l'on lisait de tout sur ses masques bancales. Le sien ne bougeait pas, impeccable. Elle croisa soudainement le regard d'un des valets du prince qu'elle avait vu affalé dans un fauteuil rouge sang. Elle lui adressa un sourire timide comme elle savait si bien el faire puis detourna le regard telle une jeune vierge effarouchée. Elle connaissait son rôle sur le bout des doigts et pas question de se tromper à la première.

    Monsieur reparu bien vite et, tendant son bras à sa fiancée, la conduisit prestement jusqu'au prince. Elle, face à l'objet de la soirée, fixait sur lui des yeux insistants, regards toutefois discrets. Il sembla destabilisé par l'approche de Leopoldine qui n'aurait pourtant sur faire peur à une mouche avec sa frêle allure de jeune première. Il replaca bien vite son masque mais sa frustration n'avait pas échappé à la célèbre veuve et cela ne manqua pas de lui arracher un petit sourire en coin. Elle se demanda s'il n'aurait pas des doutes sur elle. Auquel cas le jeu n'aurait que plus de saveur. Et tandis que monsieur faisait les presentations, elle tendit sa main au prince qui n'aurait d'autre choix que de la baiser. « ravie de faire enfin votre conaissance mon prince. c'est que l'on m'a tellement parlé de vous. » Elle lança un sourire complice à son fiancé, toujours sans e démarquer de son légendaire sourire.

    Ce prince était un intriguant. Il ne paraissait rien de ce qu'il était et l'on distinguait chez lui un certain non-respect des codes de l'étiquette. Pour sûr le personnage était interessant et il vaudrait qu'elle s'y attardât d'un peu plus près. Que la fête commence.


    [encore mille pardons pour mon retard]
Revenir en haut Aller en bas
Edouard de Galles
Maman a dit : pas de drogue le dimanche.

Edouard de Galles


Messages : 20
Date d'inscription : 28/10/2010

Hunting party in Buckingham [to my deer Leopoldine] Empty
MessageSujet: Re: Hunting party in Buckingham [to my deer Leopoldine]   Hunting party in Buckingham [to my deer Leopoldine] Icon_minitimeMar 28 Déc - 6:13

Il n'a su résister, la première fois qu'elle lui est apparue il y a... quelques temps, déjà. C'était aux jardins. Elle était belle. Ah oui, ça, pour être belle, elle l'était et, pas qu'un peu. Mais ne l'est-elle pas toujours? N'a-t-elle pas une sorte de don et, de ces traits, nom de Dieu! De ces traits dont le charme irrésistible frappe jusqu'au coeur fier et froid des princes. C'est de ce charme-là, dont il s'agit.

Enfin voici, Edouard la regarde, puis le regarde, ce précieux ami, sans découvrir son sourire du bout de ses doigts tachés. Elle, son parfum, l'a ramené aux jardins, un instant, le temps d'une pensée, d'un souvenir éclair. Elle était passée, vraisemblablement sans le voir, et il l'avait observée jusqu'à la perdre de vue puis, pris d'un soudain empressement pour la solitude, avait trouvé refuge dans un recoin du palais, sous le palais, bien au frais près des bouteilles. Mais l'atmosphère s'était bien vite réchauffée. Les méninges baignant dans le vin, il était monté dans le train du rêve et s'était fort agréablement laisser aller à divaguer, à dérailler. Il s'était vu petit garçon, dans son costume militaire rouge, égaré dans une salle de bal gorgée de géants. Elle était apparue, les épaules couvertes d'un soyeux manteau de fourrure, un masque couvrant le haut de son visage. Il avait tenté de la suivre. Elle était plus rapide que lui cependant elle laissait derrière elle les traces ensanglantées de ses pas. La rêverie s'était terminée ainsi, à peu près, et Edouard s'était éveillé, le lendemain, confortablement installé dans son lit. L'on avait jamais plus évoqué l'épisode de la cave à vin, du moins en sa présence. Même ses tentatives les moins subtiles de ramener le sujet avaient été vaines.

Cette main le rend sourd. Le prince n'entend pas plus la musique de l'orchestre que la voix de son pourtant très cher ami qui prend soin d'introduire madame à monsieur. Ainsi, à la vue de cette main devant lui se résout-il finalement à déloger de son faux trône. Avec une aisance et une grâce qui contrastent avec la lâche position assise qu'il occupait, Edouard se lève et rejoint son invité favori dans les nuages. Ses yeux, par contre, ne démordent pas du visage de la louve. Elle s'est faite agneau, pour l'occasion, songe-t-il en haussant narquoisement un sourcil. Il fait un pas vers la demoiselle puis, cueille sa main au creux de la sienne, s'incline et, sa bouche se rapprochant sensiblement de sa cible, il abaisse un instant ses paupières, le temps d'appuyer ses lèvres sur la soie de cette main. Il se redresse et range ses mains derrière son dos tout en évitant de la regarder dans les yeux.
- Elle sent la fleur, votre fiancée...
À peine a-t-il tendu l'ombre d'une perche qu'ils se précipitent tous pour l'attraper. C'est tellement facile, se dit Edouard en esquissant un sourire en coin.
- La rose! C'est de la rose, je le sens! fait Tom en bondissant sur ses pieds, nez en l'air.
- Plutôt la lavande, je dirais, corrige l'un des galants.
On suppose, chacun défend sa fleur, on fait l'éloge d'untel parfum, on dénigre tel autre. Edouard ne dit mot et profite de la diversion pour se dérober. Du centre du cercle de jeunes gens, il passe à la droite de la fiancée de l'heure. Il tourne la tête et son regard, surplombant la tête de la demoiselle, trouve l'attention du fiancé.
- Mais qu'importe le parfum. C'est à sa grâce, que l'on juge de la qualité d'une jeune femme, et c'est à la danse, que l'on juge de la grâce. Permettez?
Il ne demande que pour la forme, et évidemment, Monsieur ne lui refuse point le caprice. Fin sourire au visage, Edouard pivote sur lui-même et glisse, d'un geste coulant, sa main sur la taille de sa partenaire, jusqu'à trouver le creux de son dos, contre lequel s'étalent et se pressent ses doigts. Il l'entraîne contre lui, avec lui. Il se fait un plaisir d'oublier ses camarades et de leur abandonner son fidèle ami. Elle est à moi, se plaît-il à songer.

À nouveau, la voie se trace d'elle-même. Les pas interrompent leur chemin pour ne pas entraver celui du prince. On détaille, sans dire mot, la compagne de l'héritier. Silencieux, on juge, tout en se maquillant de respect. Edouard ne voit rien, parce qu'il en a décidé ainsi et préfère ne voir que les yeux de sa soeur rouler vers les cieux, et le discret et indéchiffrable sourire de sa mère. Il voit les musiciens aussi et, lorsqu'il atteint le centre de la salle, au beau milieu de la piste de danse, et que sa main jusqu'à présent libre s'empare doucement de celle de sa cavalière, il fait signe au pianiste, hochant légèrement la tête. Aussitôt, ce dernier, d'un premier accord, entame une valse, de Chopin cette fois. Le rythme est d'abord lent, la mélodie est nostalgique, d'une triste légèreté, ou plutôt d'une tristesse désinvolte.
C'est sur une piste désertée qu'Edouard entraîne la belle. Peu soucieux des normes de la valse, il fait face à sa partenaire, la dévisage presque, cependant ses pas n'en sont pas moins en parfait accord avec la musique, tout en souplesse, d'une facilité frisant l'inconvenance.
- Jasmin, non? La fleur de l'amour, n'est-ce pas approprié... Symbole de la beauté, symbole de la femme et de ses charmes... L'irrésistible jasmin. Voilà qui vous sied parfaitement, mademoiselle Lackey.
Il veut voir cette chevelure sévèrement domptée danser aussi. D'une main sûre, il tire sur la broche décorant la tête de la jeune femme et libère ainsi quelques mèches, qu'il sourit, ravi, de voir encadrer ce beau visage. Le bijou se retrouve dans la poche intérieur de son veston. Puis le rythme de la valse accélère et le prince en fait de même, attirant sa cavalière plus près de lui avant de l'entraîner dans le tourbillon des prochaines mesures. Nul n'ose les rejoindre, l'on préfère le rôle de spectateur, lorsque le prince se met en scène, d'autant plus que le morceau n'est pas des plus aisé à soutenir. Tous ne sont pas complices privilégiés du pianiste. Ainsi Edouard est satisfait et règne en maître sur son désert de musique.

Le tempo ralentit, les danseurs retrouvent à pas lents, mesurés, le centre de la salle. Le prince, cependant, ne libère pas si tôt sa proie. Il se fait sérieux, tout d'un coup. À sa demande, toute aussi discrète que la première, l'orchestre reprend, d'un air connu, et alors reviennent sur la piste, petit à petit, les couples de danseurs.
- Léopoldine, commence-t-il froidement en arrimant solidement son regard au sien, je ne puis désapprouver votre choix puisque, de tous les imbéciles qui hantent cette Cour, vous avez choisi le moins sot. Le moins cupide. Le moins laid, aussi. Mais de tous les favoris, c'est précisément sur le mien, que vous avez jeté votre dévolu. Puissiez-vous ne jamais l'oublier.
Il redresse la tête, affiche un air las, hautain, soupire et, entreprend de raccompagner la fiancée à son futur mari. Mais il s'arrête à mi-chemin, avant de rejoindre le petit groupe qu'ils ont laissés, et fait face une fois de plus à Léopoldine. Il tire la broche de sa veste, mais l'y réchappe aussitôt. Plutôt, il replace doucement, de sa main, une mèche rebelle derrière l'oreille, à laquelle il murmure, d'un ton moqueur mais dont la pointe d'irritation lui échappe quelque peu.
- Épousez donc quelque bon titre, que je vous fasse reine.
Fuyant la possible réponse qu'elle pourrait lui offrir, il s'empresse de retrouver ses garçons et de se terrer derrière un radieux sourire. Au passage, il offre une claque princière à l'épaule du fiancé, tout en lui soufflant :
- Pas mal, François, mais nous devrons parler, seuls, plus tard. Ces escarpins ont un je-ne-sais-quoi de menaçant.
Un clin d'oeil et ça y est. Il retrouve son fauteuil et s'y laisse tomber sans grâce.
- Allez danser, allez faire les singes, que je ne m'endorme pas trop tôt.
Obéissants, petit Tom et cie, accompagnés de leurs amies, vont se joindre à la danse, laissant seul derrière eux leur prince, non loin l'heureux François et sa douce, et non loin encore tous les autres.
Edouard baille. Il regarde ses mains et ricane. Il lève les yeux vers Léopoldine, se redresse sur son siège et, rieur, élève la voix à l'attention de son favori.
- Encore faut-il que je l'entretienne un peu, votre petite princesse, mon bon François, car la grâce sans l'esprit ne vaut rien!
D'un geste du bras il invite la jeune femme à prendre place à ses côtés.
- François, il y a là-bas madame la reine ma très royale maman qui, si j'en crois la hauteur et la largeur du pli sur son front... fait-il en plissant les yeux comme pour mieux l'étudier, serait fort heureuse de s'entretenir un moment avec vous.
Il observe son ami s'éloigner puis, sans tourner la tête vers son interlocutrice, reprend.
- Vous aimez la chasse, mademoiselle?
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé





Hunting party in Buckingham [to my deer Leopoldine] Empty
MessageSujet: Re: Hunting party in Buckingham [to my deer Leopoldine]   Hunting party in Buckingham [to my deer Leopoldine] Icon_minitime

Revenir en haut Aller en bas
 
Hunting party in Buckingham [to my deer Leopoldine]
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» LEOPOLDINE - tu me soules, je t'élimine
» gramophone party

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
WHITECHAPEL :: « LONDON, FAR FROM HELL » :: god bless the queen !-
Sauter vers: